2010 : De Bora Bora à Nouméa

Écrit de mars à août 2010 dans les lagons du Pacifique Sud pour la famille, les amis, pour le plaisir aussi...

 

 

Diaporama de notre escale sur l'atoll de Mopélia (Polynésie française) sans doute l'une de nos plus belles escales :

https://www.youtube.com/watch?v=naRNdf87dPM

 

 

Pour les aspects techniques du bateau, vous pouvez consulter l'article suivant :

https://sergeetdomi.blog4ever.com/blog/lire-article-490015-2304997-reflexion_sur_le_bateau_de_voyage__technique_.html

 

 

 

Sommaire :

 

1 – Maupiti (Polynésie / Îles sous le Vent)

2 – Mopelia (Polynésie / Îles sous le Vent)

3 – Suvarow (Cook Island)

4 – Vava'U Group (Tonga)

5 – Savusavu (Fidji)

6 – Nouméa (Nouvelle Calédonie)

7 – Annexe météo pour la zone comprise entre la Polynésie française et la Nouvelle Calédonie

 

 

 

1 – Maupiti

 

Nous sommes au mouillage à Maupiti, petite île située à 23M (40 km) sous le vent de Bora Bora. Un catamaran de location avec quatre couples à bord est venu jeter l'ancre juste à-côté de l'Oie Sauvage, (bien que le mouillage s'étende sur environ un demi-mile). Alors que le soleil passe derrière les falaises au pied desquelles le village est adossé, j'entends des cris et des rires joyeux : la séance douche a commencé sur le cata. C'est visiblement le bon moment de la journée, celui où les blagues fusent, où l'on communie avec la nature. Une dame replète en tenue d'Ève d'environ cinquante cinq ans a initié le rituel sur la jupe arrière. Je l'observe à la dérobée alors qu'elle savonne son intimité avec ardeur la bougresse. De jeunes polynésiens passent en va'a, ces étroites et belles pirogues à balancier. Elle les regarde avec un gentil sourire, l'air de dire : « Voyez, moi aussi je suis une bonne sauvage, je n'hésite pas à me mettre à poil ! ». Puis c'est le tour de Monsieur... Je constate que si Madame avait pris grand soin du coté face, Monsieur est un méticuleux coté pile... Bon... Finalement, je descends dans le carré pour continuer à écrire... Tard dans la soirée, ils chantent en canon et à tue-tête : « Frère Jacques, frère Jacques, dormez-vous, à poil, dormez vous, à poil, sonnez les mâtines à poil... » et ça rigole... Ah... les croisières sous les tropiques...

 

Cliquez sur les photos pour les agrandir 



Vue du sommet du Pahahere de Maupiti. Au loin l'entrée de la passe

  

Je me réveille au lever du jour. Il a beaucoup plu cette nuit, rien ne bouge dans le lagon. Assis dans le cockpit, je contemple avec avec une benoite satisfaction mes deux seaux pleins à ras bord. Je les aime bien mes deux seaux, ils font partie du bord depuis le début du périple. On s'attache à des riens en voyage. Ils servent également de vase de nuit lorsque le bateau est au sec au chantier, et de récupérateur d'huile lorsque je fais la vidange du moteur. Cela fait huuurler Dominique, elle dit que cela donne un goût à l'eau ! Je lui répond que cela ne se peut car je les nettoie soigneusement au Paic citron entre chaque usage spécifique. « Je suis incapable de prendre au sérieux ce qui ne compte pas, de me tourmenter de ce qui est vain » écrivait Claude Roy... il est vrai qu'il ne parlait pas de ses seaux...

 

La passe de Maupiti est dangereuse par grosse houle de sud. Avant de quitter Bora-Bora il peut être utile d'appeler Gérald au 723 048. Il tient la pension de famille Poe Iti sur le motu Tuanai, face au mouillage, au pied de deux immenses éoliennes. Il connait parfaitement le lagon et vous dira si la passe est praticable. Rendez lui visite, il vous indiquera les bons plans de Maupiti.

 

Cueillette des oeufs pour le repas du soir... (Atoll de Maupélia, Polynésie française)

 

 

 

2 – Mopélia

 

L'atoll de Mopélia (16°49'S/153°57'W) est, avec celui de Scilly, le plus occidental de la Polynésie française. Sur le motu principal, long de 4M (7km) et large de 200 mètres environ, ne vit plus qu'une famille avec deux employés pour la récolte du coprah (noix de coco), en tout six adultes et trois enfants.

 

Tous les soirs nous dînons avec la famille. Ce soir l'alizé est léger, assis sur une chaise en plastique je contemple le décors : Onze cochons, un groupe électrogène complètement rouillé, trois canards, neuf chiens, un vélo d'enfant hors d'usage, des poules, des outils épars, tout cela vit en liberté et en bonne intelligence à deux pas de la plage de sable blanc. La cuisine se fait au feu de bois dans des chaudrons noircis par la fumée, tout n'est fait que de planches et de tôles ondulées mais, le croirez-vous, nous ne nous sommes jamais sentis si proche du paradis. Trois panneaux solaires alimentent deux petites ampoules, la télévision satellite et... la console de jeux de Tetuanui. Pas de groupe électrogène, pas de frigo... Des citernes stockent l'eau de pluie. Bellingshausen (du nom de l'atoll voisin), l'un des petits garçons, n'a que vingt mois mais il montre une extraordinaire vitalité. Il court pieds nus en criant après les cochons et les chiens qui détalent devant lui. Marie-Justine, jeune et jolie maman de vingt ans prépare le repas.

 

Maupélia, juste devant la famille

 

Justement, ce soir au menu : Langoustes, énormes crabes de cocotier, omelette d'œufs de sterne, ragout de frégate. Kalami, le patriarche, nous raconte un peu sa vie.

  • Je suis né à Bellingshausen, un atoll qui est à 65M au NW de Mopelia. On faisait le coprah là-bas aussi...

  • Tu es donc venu à Mopélia après ?

  • Non, j'ai d'abord fait la pêche à Papeete, ça gagnait bien au début... Après ça valait plus le coup, alors nous sommes venus nous installer ici...

  • Et maintenant, qui habite Bellingshaussen ?

  • Plus personne... Avant c'était mon petit frère qui l'occupait avec sa femme et leurs six enfants, plus un couple d'employés... Et puis en 1997, il y a eu le cyclone Martin...

Il raconte en parlant doucement, laissant des silences entre chaque phrase, comme si son regard perdu dans le vide vivait la scène :

  • Le vent... 200 Km/h... Les grosses déferlantes qui commencent à recouvrir le motu... Certains essayent de se réfugier sur le bloc de béton de la cuve à eau... Emportés... A chaque train de déferlantes, une sœur, un frère, emportés... La femme qui hurle : le bébé, le bébé.... Mon frère qui crie : Mettez-le dans la glacière ça flottera peut-être... Emportés... Seul la femme de l'employé s'en est tirée en grimpant à un cocotier et en s'attachant à l'arbre...

Cueilli à froid, en pleine euphorie, la bouche pleine de langouste, j'ai du mal à déglutir...

 

Fou à Maupélia

 

La nuit dernière nous sommes allés pêcher les langoustes sur le platier. Kalami nous a déposés à trois milles au nord des farés (lieu de vie). Le lagon était calme, magnifique sous la lune, moment magique. J'y suis allé de mon refrain :

  • Regarde Kalami, là, tu vois Sirus, Canopus, Riguel Al Kantarus, tu te rends compte que ces étoiles ont sans doute guidé tes ancêtres lorsqu'ils ont exploré le Pacifique. La forme des nuages, de la houle, le vol des oiseaux pouvaient leur indiquer la proximité d'une terre...

Il garde le silence un moment puis avec son inimitable accent polynésien, ses 130 kg, ses grosses pattes et ses larges épaules :

  • C'est des conneries tout ça, c'est pour remplir les livres... Ils sont allés tout droit, comme ça ! Ricane-t-il en fendant l'air de sa main ouverte...

  • … :-(

 

Ce matin nous attendons un thonier venu de Papeete distant de 260M (470 km). Il doit apporter du matériel et les vivres de base à la famille. Depuis quelques mois, la goélette, ce petit cargo qui ravitaille les îles ne vient plus régulièrement. Une famille, ce n'est pas rentable... Alors on se débrouille, des amis, la famille à Papeete remettent le matériel à des bateaux de pêche, au cas où ils passeraient près de Mopélia... Kalami est venu à bord de l'Oie Sauvage. Dans les jumelles, nous apercevons le thonier à proximité de la passe distante de 4M. Il appelle le capitaine par notre VHF.

 

Kalami

 

Celui-ci l'informe qu'il a talonné dans la passe et qu'il hésite à faire une deuxième tentative. Nous sautons dans la pirogue après l'avoir informé que nous venons pour le guider. Embarquement sur le thonier : Seize mètres, en aluminium, trois hommes d'équipage en plus du capitaine, bateau en très bon état. La longue ligne à thon de quatre vingt kilomètres (80 km) est à poste, roulée sur un grand touret de deux mètres de long sur un mètre cinquante de diamètre. C'est pour cela que ces pêcheurs s'appèlent les « long liners » Dans la timonerie, pas besoin de parler tahitien pour comprendre :

  • Vas-y ! Un peu à gauche, un peu à droite, vas-y, vas-y...

  • J'le sens pas, j'le sens pas...

De chaque coté de la passe, à quelques dizaines de mètres, la longue houle du Pacifique brise avec fracas. Au dernier moment, il met tout à droite comme un cheval qui refuse l'obstacle. Ils s'y reprendront à trois fois avant que le capitaine nous dise :

  • Je reste dehors.

Je le comprends, la passe mesure environ vingt mètres de large avec un fort courant sortant la plupart du temps et des haut-fonds non balisés en entrée de lagon. Nous n'en menions pas large lorsque nous l'avons embouquée la semaine dernière. Dans une houle de trois mètres, nous mettons la pirogue à couple du thonier et la chargeons de tubes d'aluminium, de vivres, de sacs de ciment, d'objets divers. Il faudra trois voyages, huit miles à chaque aller-retour, beaucoup d'essence dépensée, un bien précieux ici...

 

(Vous pouvez visualiser Mopélia et sa passe (au NW de l'atoll) en allant sur Google Earth et en tapant : Maupihia)

 

Aujourd'hui, journée chasse sous-marine près de la passe. Nous nous y rendons avec l'Oie Sauvage en remorquant leur pirogue pour économiser l'essence. Marie-Justine et les enfants sont du voyage, l'ambiance à bord est chaleureuse. Dominique sort les petits gâteaux et les jus de fruit. Au NW de l'atoll, à l'extérieur du lagon, près de la passe, Camille, le fils adoptif de Kalami, m'amène sur l'épave du « Seeadler », corsaire allemand qui a écumé la région durant la première guerre mondiale. Son Commandant, le capitaine Felix Von Luckner, arraisonnait les cargos, les contraignait à se rendre, puis embarquait à son bord tout l'équipage avant de couler le navire au canon.

 


Le Commandant ennemi se voyait attribuer la meilleure cabine du bord et dînait à la table du flamboyant Capitaine. La guerre en gentlemen quoi ! Mais un jour, il mouille son ancre à l'entrée de la passe. Pour une raison qui, à ma connaissance, n'a jamais vraiment été élucidée, le grand trois mâts à vapeur de quatre vingt mètre de long est drossé sur le récif et détruit par les déferlantes. Dans une eau étonnamment limpide, je contemple ce qui reste du Corsaire : les moteurs, des poutrelles, beaucoup de poissons perroquets et des requins.

 

Le Capitaine comte Felix Von Luckner

 

Pour en savoir plus sur le « Seeadler » et son capitaine :

http://fr.wikipedia.org/wiki/F%C3%A9lix_Von_Luckner

http://fr.wikipedia.org/wiki/Seeadler

http://souvenirs-de-mer.blogdns.net/spip.php?article114

 

 

Ce sont les poissons perroquet, les carangues et les « gros yeux » que nous tirons le plus. Mais les requins, qui tournent depuis le début de la pêche, deviennent de plus en plus nerveux. Je cris à Camille :

  • C'est un peu chaud là, non ?

  • Non, non, t'en fait pas, mais tiens bien les poissons au dessus de ta tête hors de l'eau quand tu les ramènes à la pirogue, répond-il, paisible...

Sophie, l'épouse de Kalami souffre de terribles crise d'asthme. Il y a un mois maintenant elle a été proche de « l'issue fatale » comme on dit. Heureusement des amis popas (français) venus rendre visite à la famille en voilier, ont contacté Papeete par BLU. Une EVASAN (Évacuation sanitaire) a immédiatement été lancée. Le pilote de l'Armée de l'air a posé son Puma en virtuose sur la plage, l'extrémité des pales à quelques mètres des cocotiers. Masque à oxygène, embarquement, geste de la main, et c'est l'âme de Mopélia qui s'envole. Trois semaines après, elle est revenue avec un thonier, le jour de notre arrivée à Mopélia, joyeux retour Sophie !

 

Je pourrais vous parler de Mopélia pendant des heures... Cette escale nous a bouleversés, ils étaient quarante il y quatre ans, ils ne sont plus que neuf à s'accrocher à leur atoll... Les derniers des Mohicans...

 

 

 

(Juillet 2011, j'apprends par des amis vivant à Papeete, que la famille a été expulsée de Mopelia. L'atoll est donc maintenant désert, livré aux braconniers de tortues venus de Maupiti)

 

 

Il est temps de nous préparer pour de plus longues traversées : Gréement des lignes de vie, confection du bidon de survie, rappel des gestes de base :

  • Le feu se déclare dans le coin cuisine, qu'est-ce que tu fais ?

  • Je bondis sur l'extincteur, j'attaque le feu à la base...

  • Bien, je suis gravement blessé et inconscient, qu'est-ce que tu fais ?

  • Les gestes de premiers secours et j'appelle le Centre Médical de Toulouse au 05 61 49 33 33 avec la check-list collée sous la table à carte.

  • Bien, je fais une crise cardiaque et je clamse, là, ça y est, j'suis mort, qu'est-ce que tu fais ?

Je ne sais pas pourquoi, elle me regarde bizarrement, comme si j'avais dit quelque chose d'incongrue.

  • Hé bien qu'est-ce que tu fais, tu as vérifié, ça y est ton Tarzan est au paradis des navigateurs !

  • Ben je ne sais pas moi, je fais rien...

  • Comment ça tu fais rien !

  • Ça m'agace tes questions à la noix ! J'appelle ma Mère, voilà !

  • C'est pas une réponse ça ! D'abord, il n'y a plus aucune urgence, donc cool, tu notes tout dans le livre de bord, tu prends des photos de ma pomme, éventuellement tu appelles le CROSS GRIS-NEZ pour demander des instructions et tu me balances par dessus bord !

  • Mais t'es malade, je te garde !

  • Pas possible chérie, il fait trop chaud, au bout de quelques jours, le spectacle ne serait pas folichon et risquerait t'entacher le merveilleux souvenir que tu veux garder de moi...

Elle me regarde encore avec son drôle d'air, c'est curieux je n'arrive pas à la faire rire aujourd'hui...

  • Ah, puis n'oublie pas, tu me mets la ceinture de plomb avant le grand plongeon, me voir flotter dans le sillage de l'Oie Sauvage risquerait de perturber tes nuits... Le plus simple ensuite est de rallier directement Nouméa, c'est mieux pour les formalités...

Avant de partir de France, j'ai contacté le CROSS GRIS-NEZ qui m'a répondu de façon très courtoise et professionnelle. En cas de problème grave, je voulais savoir si je pouvais les appeler. Un monsieur m'a répondu :

  • Pas de problème ! Nous nous chargeons de la coordination des secours au niveau international. Vous avez un Iridium, très bien, avez-vous une balise de détresse ?
  • Heu... non...
  • Vous devriez Monsieur, Nous avons traité plusieurs cas où elle a été utile...
  • Vraiment...

 

Il m'indique que nous pourrons les appeler (03 21 87 21 87) ou leur envoyer un mail (gris-nez@mrccfr.eu) à chaque étape du voyage, ils seront ainsi informés de notre position en cas de problème grave.

 

 

Pour plus d'informations sur les balises de détresse, voir :

http://www.plaisance-pratique.com/balises-de-detresse-laquelle

 

Bora-Bora / Nouméa c'est environ 3000 miles par le chemin des écoliers (5400 km) avec, sur la route, de multiples possibilités d'escales. Deux routes s'offrent au navigateur pour rejoindre les Tonga : La route Nord qui passe par Suvarow (13°16'S / 163°07'W) et la route Sud avec pour escale Aitutaki (18°54'S / 159°47'W) Palmerston (18°03'S / 163°09'W) et Niue (19°03'S / 169°51'W). Les voyageurs rencontreront plus de vent sur la route Sud, celle du Nord étant réputée plus tranquille avec des risques de pétole. Nous choisissons celle du Nord car nous ne sommes que de modestes plaisanciers, de plus des amis nous ont dit le plus grand bien des escales possibles sur cette route.

 

Maupelia, le grain approche...

 

 

 

3 - Suvarow (Îles Cook)

 

Le lagon étant très bas, nous franchissons aisément la passe de Mopélia. Les fichiers Grib que nous avons soigneusement étudiés avant de partir nous annoncent 15N de vent pour les sept jours à venir. Largement suffisant pour couvrir les 560M (1000km) qui nous séparent de Suvarow. Super, c'est parti vent arrière dans des conditions idéales. Mais quelques heures après notre départ, le vent commence à monter, vingt, vingt cinq nœuds, nous prenons le premier ris et roulons du génois. Deux grosses houles, l'une de NE, l'autre de SW avec en prime un méchant clapot d'Est forment une mer très inconfortable. A 19h00 je constate que le baromètre est en forte baisse. Le vent continue à forcir. De gros nuages très sombres nous barrent l'horizon; à la tombée de la nuit je pense nous allons à l'encontre d'un front. Nous nous préparons au mauvais temps.

 

Quelques heures plus tard, il fait noir comme dans un four, des éclairs embrasent le ciel quasiment sans discontinuer, le vent continue de monter, trente nœuds, rafales à quarante, le tonnerre apporte une touche wagnérienne au tableau, l'atmosphère est quelque peu oppressante. Nous nous préparons à passer une nuit tonique. Coté bateau tout va bien, l'Oie Sauvage est dans son élément, coté équipage, cela pourrait aller mieux : n'ayant eu que des temps de demoiselles pour arriver à Mopelia, nous nous apercevons vite que nous ne sommes pas encore complètement amarinés. C'est donc avec un enthousiasme modéré que je contemple l'Oie Sauvage s'offrir des surfs à plus de 14N.

 

J'observe Dominique du coin de l'oeil; je sais qu'elle déteste "ça". In peto, je me dis : "Et toi, est-ce que tu aimes "ça" ? Une petite voix répond sournoisement : "Mais après quoi coures-tu ? Qu'est-ce que tu fous dans cette galère ?" Mais aussitôt, du plus profond de ma conscience, une autre voix hurle : "Oui j'aime "ça", j'aime "ça" par dessus tout, le risque (mesuré) est le sel de l'existence, lorsque je préférerai les charentaises à cette vie-là, ce sera le début de la vieillesse !"

 

Lorsque j'étais plus jeune et que je lisais « La Longue Route » dans mon lit bien douillet, je m'imaginais, transcendé par de fantastiques déboulés sous spi dans un alizé musclé; pour l'heure, nous parlons peu, nous mangeons peu, je trouve le Pacifique très grand, très vide, (de Bora-Bora à la Nouvelle Calédonie, nous n'aurons pas rencontré un seul bateau au large). Je me surprends à imaginer une poêlée de châtaignes dans la cheminée, à la maison, entre amis ou en famille...

 

Le baromètre chute de dix millibars dans la nuit. Je ne peux pas ne pas penser au risque de cyclone car nous sommes tôt en saison, mais dans la matinée la pression barométrique se stabilise, le vent tombe et tourne, nous nous retrouvons au près dans des petits airs toujours avec une mer désordonnée. Les masses nuageuses sont toujours extrêmement compactes. Au point de midi, alors que ce matin le vent a bien faibli, je note que nous avons couvert 174M (313 km) en 24 heures.

Nous venons de faire connaissance avec la Zone de Convergence du Pacifique Sud (Voir annexe météo)

Cerise sur le gâteau : Après cinq jours de mer, nous arrivons trop tard dans la soirée pour entrer dans le lagon de Suvarow en sécurité, nous passons donc la dernière nuit à capeyer à une vingtaine de miles de l'atoll.

 

ça commence à monter, il va falloir réduire...

 

Suvarow est un atoll inhabité classé parc national, qui fait partie des Îles Cook, petit état indépendant fortement aidé économiquement par la Nouvelle-Zélande. Vingt mille habitants, quinze îles étalées du nord au sud sur près de 800M (1440 km). Durant la pleine saison, deux gardes habitent le motu principal de l'atoll. Leur travail consiste à tamponner les passeports des voyageurs et à prélever cinquante dollars par bateau. Nous avons de la chance, ils n'arrivent que début juin.

 

La passe de Suvarow se franchit sans problème par conditions météo normales. Nous arrivons dans un lieu mythique car un personnage très populaire dans l'hémisphère sud, Tom Neal, a vécu là en ermite durant dix sept ans. Il a écrit un livre « One island for myself »

Le mouillage est parsemé de patates de corail, il ne doit pas faire bon traîner par ici lorsque le vent tourne. Notre guide nautique indique que dans cet atoll les requins sont renommés pour leur agressivité, nous les trouvons plutôt plus froussards qu'ailleurs...

 

Edward et Helen, un adorable couple d'américains, est arrivé la veille. Anciens musiciens professionnels, ils tournent autour du monde depuis quatre ans sur leur voilier de vingt sept pieds qu'ils ont appelé « Entracte » car ils se sont rencontrés durant l'entracte d'un concert. Lui a été le batteur de Chuck Berry... Il a joué au Palais à Belle Île ! Incroyable, non ?

 

Durant notre traversée, le bras de liaison de notre pilote automatique ST 6001 a légèrement glissé sur l'axe du safran, sans que cela ne l'empêche de barrer. Tranquillement, au mouillage, alors que je le repositionne et serre fortement les vis reliant les deux coquilles, j'entends un bruit sec et ma main part dans le vide. L'une des vis a écarté les lèvres de la pièce, impossible de serrer ! Je réalise en une fraction de seconde que notre pilote automatique est hors d'usage, c'est l'équipement clé pour nous qui naviguons en équipage réduit. Je suis consterné. J'observe que la pièce a été mal usinée par le chantier qui m'a livré le bateau. Heureusement, j'avais prévu un ST 3000 en secours. A ma grande surprise, il barrera sans problème jusqu'aux Tonga dans des conditions parfois difficiles !

Encore un exemple où le constructeur du bateau n'est pas en cause, l'équipementier Raymarine non plus, mais le chantier qui a installé le pilote n'a pas travaillé selon les règles de l'art ! Une grande classique !

 

 

 

 

4 - Les Tonga

 

La traversée Suvarow / Les Tonga, 700M (1260 km), ne restera pas dans les mémoires : Pétole, grains à 35N, pluie torrentielle, une mer toujours chaotique. Le pire est la tenue des voiles et du gréement dans les petits airs. C'est ingérable, même avec la bôme bien amarrée. Un soir, nous décidons de tout affaler, de tout amarrer et d'aller dormir ! Nous allons rouler comme des malheureux jusqu'au matin mais au moins nous n'entendrons plus la grand voile qui dévente et se remplit en ébranlant le gréement à chaque lame ! La journée suivante, dans un souffle de cinq à sept nœuds, nous constatons qu'il est plus confortable de garder la grand-voile affalée, bôme amarrée, et d'avancer sous génois seul.

 

Le vent rentre enfin, mais nous devons réduire si nous voulons arriver de jour. C'est donc sous génois seul que nous terminons la traversée. Au petit matin nous touchons Neiafu du Vava'U Group, dans les Tonga du nord : 18°39'S / 173°59'W.

 

Mon premier souci est de trouver un artisan capable de m'usiner une nouvelle pièce pour notre pilote automatique. Je comprends vite que cela relève de l'utopie. Cependant, en traînant, d'un « boui-boui » à l'autre, je tombe sur un monsieur qui a l'air de connaître son affaire. Dans un anglais très approximatif :

  • Peux-tu me fabriquer la même pièce, je suis un peu pressé...

  • Pourquoi tu veux en faire une nouvelle ?

  • Parce que celle-ci est « destroyed » !

  • Non, je peux réparer...

  • Comment ?

Je ne comprends pas bien ce qu'il me raconte, visiblement il ne voit pas pourquoi je veux une nouvelle pièce... De toutes les façons, je ne risque rien...

  • Pour quand (Je crains le pire)

  • Demain ?

  • OK, combien ?...

  • On verra...

Cette discussion a lieu à 16h00, le lendemain à 14h00, j'ai la pièce entre les mains, il l'a faite plus large en « chargeant » les cotés, découpé des décrochements sur l'une des coquilles pour que les vis travaillent plus efficacement, « chargé » les anciens trous, percé plus profond, taraudé, la pièce à été brossée, elle paraît neuve... « Combien ? » «  44 Euros ! »...

 

Ces Vava'U ne ressemble à rien à ce que nous avons vu jusqu'à présent : Un entrelacs d'îles, de canaux, de nombreux bons et beaux mouillages dans un rayon de 10M, super ! Ajoutez à cela que les Tongiens sont gentils et accueillants et voilà une belle escale. L'ombre au tableau : ce pays est pauvre, quelle différence avec notre Polynésie ! l'avantage est que la vie y est bon marché. Le Yacht Club de Neiafu, propose plusieurs coffres à moins de six Euros la nuit, wifi inclus.

 

Les Tonga sont l'une des dernières monarchies du Pacifique avec 100 000 habitants, 170 îles dont 134 sont inhabitées. Le royaume est étalé sur 220M (400 km) du Nord au Sud. Les hommes, tous fortement charpentés, portent une jupe (sulu) recouverte d'un curieux tapis de coco tressé avec plusieurs tours de corde en guise de ceinture. Le dimanche, Neiafu est déserte, il est interdit de travailler. Les cœurs s'élèvent de la multitude d'églises de différentes obédiences que compte la ville.

 

Quasiment tous les jours nous rejoignons la communauté des oiseaux migrateurs sur 13940 Mgh par la BLU du bord. La fréquence est animée par Jeanne et Marc à partir de Papeete. On y retrouve « Pierre qui revient de l'Alaska et qui va franchir l'équateur », Daniel « qui est à trois jours des Marquises et qui a cassé son enrouleur mais qui se débrouille sous trinquette ». Il y a ceux qui rappliquent de Panama (les plus nombreux) et ceux, comme nous, qui s'éloignent de la Polynésie. Et Jeanne, toujours : « Qu'est-ce qu'on peut faire pour vous ? Vous n'avez besoin de rien ? » Merci Jeanne...

 

Aux Tonga, comme dans toutes les îles du Pacifique, la religion est omniprésente.

 

 

 

5 - Les Fidji

 

Tonga / Fidji 400M (720 km), enfin une traversée « normale », vent 15 à 25N toujours portant, RAS.

 

Nous prenons un coffre à la Copra Shed Marina de Savusavu. (16°46'6S / 179°20'E) dans un joli bras de mer étroit et bien abrité qui s'étire entre le village et l'île Nawi. Savusavu est une agréable petite bourgade où tout le monde se dit bonjour. Le Yacht Club est sympathique et bien géré avec, luxe suprême, des douches chaudes.

 

Le mouilage de Savusavu

 

Les Fidji (880 000 habitants), sont formées de deux îles principales distantes d'une trentaine de km : Viti Levu, qui est un peu plus grande que la Corse, (où l'on trouve Savu la capitale), et Vanua Levu, qui est un peu plus petite que notre Île de Beauté. Ajoutez à cela 332 îlots ou atolls et vous avez une magnifique destination touristique et un splendide bassin de navigation. Le soir à la fraîche on boit une bière pour 80C d'Euro au Yacht club en contemplant son bateau sur coffre à quelques dizaines de mètres. Tous les jours nous découvrons avec plaisir un « petit indien », une échoppe où l'on mange de délicieux et abondants curry pour 2,5 Euros.

 

Ce qui surprend en effet en flânant dans les rues, c'est la touche « Bollywood ». Visiblement tous les magasins et le business sont tenus par des indiens. Ce sont les anglais qui firent venir les premiers 500 indiens en 1879. Puis, jusqu'en 1916, 60 000 émigrants, venus principalement de Calcutta, vont constituer la main d'œuvre qui travaillera dans les champs de canne à sucre. Lorsque l'on sait qu'à cette époque la population fidjienne de souche est de 80 000 habitants, on peut imaginer le déséquilibre démographique. En fait, ce fut la chance des Fidji. L'activité de cette communauté indienne, travailleuse, entreprenante et industrieuse explique la relative prospérité des Fidji par rapport aux autres îles du Pacifique Sud. (Excepté la Polynésie française bien sûr qui fait figure de nantie)

Les indiens vont tellement bien prendre les affaires en main qu'en 1987, suite à des élections, ils accèdent au pouvoir. Les militaires conservateurs estiment alors que la démocratie a tout de même des limites et ils organisent un coup d'état bien propre, sans effusion de sang pour remettre des fidjiens de souche au pouvoir. Nous nous apercevrons vite que derrière la joie de vivre que l'on rencontre partout, l'intégration est loin d'être réalisée.

 

Comme aux Tonga, la religion est omniprésente. Nous lisons, incrédules, un article du journal local, le « Fidji Times » qui relate que les forces de police ont découvert une plantation de cannabis et l'ont détruite en suivant la lumière que Dieu avait fait briller dans la montagne pour les guider.

Dimanche matin, nous nous promenons dans Savusavu déserté. Nous passons devant une sorte d'église d'où sort une fort belle musique. Je pense tout d'abord qu'il s'agit de musique enregistrée. Nous nous approchons. Un monsieur, avec beaucoup de marques de gentillesse nous invite à entrer. Un groupe de quatre chanteurs, deux hommes et deux femmes, un synthétiseur, une guitare, une batteries jouent et chantent un Gospel de toute beauté. Je demande à un monsieur de quelle église il s'agit, il répond dans le vague. « Méthodist ? » réponse négative, « Baptist ? » « No », « Evangelist », son visage s'éclaire, « Yes »... Mince, l'Église à Bush...

 

"Guerrier" fidjien (Lors d'une fête traditionnelle)

 

Alors que nous cherchons notre « petit indien » pour le déjeuner, un homme en bleu de travail accompagné d'un enfant nous aborde, visiblement gêné :

  • Bonjour, vous êtes sur un bateau ?

  • Oui

  • Vous n'auriez pas du travail pour moi ? J'ai besoin de travailler... pour ma famille...

Il a une bonne tête, il ressemble à Yannick Noah, ses yeux lancent des « Mayday » « Mayday »

  • Non désolé, mais si tu veux tu peux manger avec nous...

Pas plus tôt assis il dit :

  • Je suis désolé, mais je préférerais aller chercher du travail...

  • Pas de problème, tu ne veux pas prendre le temps de boire quelque chose ?

  • Si, pour le petit seulement alors...

Le petit en question boit son Coca avec ravissement.

  • D'où venez-vous ?

  • De France...

  • Ah... C'est loin...

Puis, après un court échange de banalités :

  • Vous êtes musiciens ?

  • Heu... Non, nous sommes surpris par sa question, et toi ?

  • Oui, je joue de la guitare et du piano...

  • Ha bon... et... tu as une guitare ?

  • Non... Répond-il comme si nous lui demandions s'il est allé sur la lune.

Nous nous regardons avec Dominique. Apprendre à jouer de la guitare pendant les traversées faisait partie de nos projets lorsque nous avons quitté les Sables d'Olonnes il y a cinq ans. Mais ce n'est pas notre truc, depuis, elle ne sert qu'à la décoration du carré.

  • Si tu veux on peut te donner une guitare...

  • …. (Regard d'incompréhension)

  • Nous avons une guitare qui ne nous sert pas et on peut te la donner...

  • Une vraie ?

  • Bien sûr !

  • Elle est grande comment, demande-t-il incrédule...

Finalement nous nous donnons rendez-vous une heure plus tard devant la marina. Lorsqu'il ouvre la housse et qu'il voit briller l'instrument, il reste sans voix.

  • Merci, merci... Voulez-vous venir chez moi ?

  • Si tu veux Josepho...

Alors que nous arrivons à proximité d'une baraque en tôle ondulée sur les hauteurs de la ville, il s'arrête, se retourne, gêné, et nous dit:

  • C'est un peu pauvre et un peu sale chez moi...

  • Ne t'inquiète pas Josepho...

Il vit là dans moins de 12m2 avec sa jolie épouse et leur cinq enfants. Litia, la maman tient un bébé de quatre semaines dans ses bras. Dominique fait comme toute les grand-mères :

  • Oh mais qu'il est mignon ce bébé, comment s'appelle-t-il ?

Josepho nous regarde alors droit dans les yeux :

  • C'est une petite fille, nous ne lui avons pas encore donné de nom, nous attendions... nous ne savions pas pourquoi... Je voudrais qu'elle s'appelle comme toi... Comment tu t'appelles ?

  • Dominique

  • Oui mais ton nom complet ?

  • Dominique Michèle...

  • Alors elle s'appellera Dominique Michèle si tu le veux bien...

Et ma Dominique à moi commence à craquer doucement...

 

Josepho, Litia, leurs enfants... et la guitare

 

En fait ce sont des fermiers qui ont tout perdu avec le dernier cyclone il y a trois mois. Ils sont venus à la ville en espérant gagner suffisamment d'argent pour se refaire en effectuant de petits boulots par-ci par-là. Mais les petits boulots ne payent même pas le loyer. Évidemment il ne faut rien espérer du gouvernement alors ils subsistent grâce à l'Armée du salut.

Nous les aiderons à acquérir les graines et des plants pour redémarrer.

 

 

6 - Nouvelle Calédonie

 

Savusavu / Nouméa : 840M / 1500 km.

La mer est encore inconfortable et nous avons hâte d'arriver. Nous pensons souvent à notre Transat et notre traversée Panama / Marquises où nous avions rencontré des mers formées, mais qui n'étaient pas des shakers comme ici. Il est vrai que cette partie du Pacifique est renommée pour être souvent agitée. De plus, je ne sais pas si cela a une influence, mais nous sommes dans une année à El Nino...

 

J'essaie de cultiver mon intellect, tout en reconnaissant qu'il y a là un vrai chantier. Je relis pour la énième fois le philosophe Michel ONFRAY. Il dit : «  L'occident judéo-chrétien libéral, au sens économique du terme, brutalement capitaliste, sauvagement marchand, cyniquement consumériste, producteur de faux biens, ignorant toute vertu, viscéralement nihiliste, fort avec les faibles, faible avec les forts, rusé et machiavélique avec tous, fasciné par l'argent et les profits, à genoux devant les pourvoyeurs de tous les pouvoirs... » Hou là ! stop !... Ce n'est pas le moment de plonger dans ce genre de lecture, je sens venir les idées noires. Finalement, je prends un San Antonio, au moins je comprends tout, et puis... c'est un philosophe à sa manière San A.

 

Depuis quelques semaines, nous vivons le voyage différemment car nous avons pris LA grande décision. Assis dans le cockpit, nous contemplons la houle qui nous rattrape :

  • Tu sais, je crois que nous faisons bien d'arrêter le voyage...

  • C'est sûr, quand je pense que le Petit a déjà deux ans... Et puis on ira voir les amis, on a plein d'amis...

  • ...

  • De toutes les façons avec les Marquises, Bora-Bora, Mopélia, nous avons fait le plus beau...

  • C'est sûr, et puis cela va nous laisser du temps pour faire plein de choses...

  • ...

  • On fera des treks, la Nouvelle Zélande, la Malaisie, il paraît que c'est super...

  • C'est sûr ce doit être super...

  • Et la maison ! On doit refaire la rocaille, installer l'électricité dans le garage...

  • ...

  • C'est sûr, on ne risque pas de s'ennuyer...

 

En ce début d'après-midi, la Nouvelle Calédonie est en vue. A la tombée de la nuit nous embouquons le chenal de la Havannah. Nous glissons doucement le long du « Caillou », poussé par un petit alizé. A cinq heures du matin, nous sommes à Nouméa.

 

C'est fini...

 

Je n'y peux rien, ce soir j'ai la chansonnette nostalgique :

 

« Dans la côte à la nuit tombée,

On chante encore sur les violons,

Au bistrot à l'accordéon,

C'est pas la bière qui t'fait pleurer...

Et l'accordéon du vieux Joe,

Envoie le vieil air du matelot,

Fout des embruns au fond des yeux...

Et ça t'reprend chaque fois qu'il pleut... »

 

Sergio et Dominique de l'Oie sauvage

 

 

 

Les informations ci-dessous pourront être utiles à ceux qui envisagent de naviguer dans le Pacifique Sud-ouest

 

7 - Annexe météo :

 

Deux facteurs sont à prendre en compte lorsque l'on envisage la traversée Polynésie française / Nouvelle Calédonie:

  1. Cette zone subit l'influence La Zone de Confluence du Pacifique Sud (ZCPS), (South Pacific Convergence Zone, SPCZ pour les anglophones)

  2. Les conditions météo y sont plus imprévisibles que dans les autres zones alizés.

 

Qu'est-ce que cette ZCPS ? (A ne pas confondre avec la Zone Intertropicale de Convergence (ZIC) qui est le classique « Pot au noir » situé à proximité de l'équateur entre les zones d'alizés NE et SE)

 

La ZCPS ( http://en.wikipedia.org/wiki/SPCZ ) (de ce que j'ai compris, je ne suis pas un expert météo) est un phénomène météo propre à la zone s'étendant de Tahiti à la Nouvelle Calédonie. Elle se présente sous forme de plusieurs développements nuageux linéaires importants (plusieurs centaines de miles de long) de taille et d'orientation différentes. Elle peut être plus ou moins active, voire totalement absente une partie de l'année. Cette ZCPS évolue rapidement de jour en jour.

Contrairement à la ZIC on n'y rencontre pas de calmes, au contraire ! Les caractéristiques de la navigation dans la ZCPS sont des pluies torrentielles, des orages et des grains parfois violents. Les conditions peuvent empirer lorsqu'un front rencontre une ZCPS, c'est ce que nous avons vécu entre Mopélia et Suvarow.

 

Après nous être fait chahuter durant cette traversée, nous avons décidé d'appliquer le principe « ceinture et bretelles » concernant la météo, en ne nous contentons pas de la simple analyse des fichiers Grib. Voici les données qui nous ont paru utiles de recouper.

 

1 – Le bulletin météo hebdomadaire de Bob Mac Davitt,

2 – La carte isobarique montrant la position de la ZCPS, les hautes et basses pressions, ainsi que les fronts et leur déplacements.

3 – Les prévisions quotidienne de Honolulu sous forme de texte,

4 – Les fichiers Grib

 

Ces données sont : 1) complémentaires, 2) gratuites, 3) accessibles à tout bateau disposant d'une messagerie à bord mais n'ayant pas accès à Internet, (SailMail ou Iridium par exemple)

 

Elles sont disponibles par SailDocs. Ceux qui ne connaissent pas encore cette extraordinaire base de données gratuite et accessible par n'importe quelle messagerie électronique, trouverons le mode opératoire en procédant de la façon suivante :

 

envoyer un mail à : query@saildocs.com

Objet : N'importe quoi

Corps du message : send info

send index

Ils recevront en retour toutes les explications nécessaires à l'utilisation de Saildocs

 

Quelles sont au juste ces quatre sources d'information pré-citées et comment les obtenir ?

 

1 – Les prévisions hebdomadaires de Bob Mac Davitt

Ce monsieur est un routeur néozélandais qui donne chaque dimanche des macro-informations météo par région sous forme de texte pour la zone allant des Galapagos à l'Australie.

 

Pour obtenir ces prévisions hebdomadaires :

envoyer un mail à : query@saildocs.com

Objet : N'importe quoi

Corps du message : send NZ.WGRM

 

Un automate vous envoie le bulletin sur votre messagerie.

 

2 – Le bulletin montrant la ZCPS :

C'est un peu plus compliqué la première fois, mais ensuite c'est très simple d'emploi. Avant de partir, lorsque vous disposez d'une connexion Internet :

 

Lorsque vous souhaitez obtenir la position de la ZCPS :

envoyer un mail à : query@saildocs.com

Objet : N'importe quoi

Corps du message : send fleet.nadi

 

L'automate vous envoie le bulletin sur votre messagerie.

  • Vous l'ouvrez (il se présente sous forme de colonnes de chiffres)

  • Vous le sauvegardez par le Blocnote dans le répertoire de votre choix.

  • Vous ouvrez ensuite le logiciel PhysPlot. Un planisphère apparaît à l'écran.

  • Du logiciel PhysPlot, par la fonction Fichier/Ouvrir, vous ouvrez le fichier du Blocnote que vous avez sauvegardé. La carte isobarique apparaît sur le planisphère.

  • Vous réduisez avec les outils du logiciel pour ne garder que la zone qui vous intéresse.

  • Vous pouvez observer les fronts, les hautes et basses pressions ainsi que les fameuses ZCPS.

  • Chaque point jaune est un lieu connu, en pointant avec la souris, le nom du lieu apparaît.

  • Notez que vous pouvez faire apparaître le bulletin texte en réduisant la carte avec votre souris à partir de la gauche. La carte n'est que la représentation graphique du texte.

  • Sur la partie texte, si la ZCPS est donnée faible (weak) ou modérée (moderate) vous allez rencontrer des grains. Si elle est indiquée « active », attention, mauvais temps en perspective!

 

3 – Les prévisions « Hi Sea » de Honolulu :

Ce bulletin, émis quotidiennement par Honolulu sous forme de texte, est très complet. Il donne en particulier les avis de coup de vent (Gale) en cours dans une vaste zone allant de ccc à ccc. Il est en effet instructif de connaître l'évolution de ces dépressions même si elles passent bien plus sud que votre route. Elles peuvent en particulier générer des vents tournants qui sont un vrai souci lorsque l'on mouille dans les atolls comme les Tuamutu par exemple.

 

Pour l'obtenir :

envoyer un mail à : query@saildocs.com

Objet : N'importe quoi

Corps du message : send FZPS40.PHFO

 

Un automate vous envoie le bulletin sur votre messagerie.

 

4 - Fichiers Grib :

envoyer un mail à : query@saildocs.com

Objet : N'importe quoi

Corps du message : Send grib:09S,20S,160W,174W|1,1|00,12,24,36,48,60,72,96,120,144,168|PRMSL,WIND

 

Ce libellé peut paraître barbare, il est bien expliqué dans la documentation Saildocs et encore mieux sur l'excellent site de Banik : http://www.banik.org/

Vous ne l'écrivez qu'une fois sur un traitement de texte, ensuite vous ne changez que les coordonnées au fur et à mesure de votre progression. Vous n'avez plus qu'à faire un copier/coller. A titre indicatif, l'exemple ci-dessus représente un rectangle de 650 sur 850M.

 

NB : Vous pouvez ne faire qu'une requête pour plusieurs objets. Exemple :

 

envoyer un mail à : query@saildocs.com

Objet : N'importe quoi

Corps du message : send NZ-WGRM

send FZPS40.PHFO

send fleet.nadi

Send grib:09S,20S,160W,174W|1,1|00,12,24,36,48,60,72,96,120,144,168|PRMSL,WIND

 

Avec Iridium et Skyfile, cette requête vous prendra environ vingt secondes d'émission et une minute de réception.

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30/04/2011
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